Introduction
Les tsunami sont des séries de vagues
d'une très grande longueur et d'une très forte
période, engendrées par des mouvements brusques
de la croûte terrestre. Les tsunami les plus catastrophiques
ont été causés par de violents séismes
dont l'épicentre était localisé sous l'océan
ou à proximité d'un océan et qui avaient
provoqué un déplacement vertical marqué
du fond océanique. Les éruptions volcaniques et
les éboulements sous-marins entraînent également
la formation de tsunami mais leurs effets sont généralement
localisés.
Quoique rares, les
tsunami sont un des phénomènes physiques les plus
complexes et les plus terrifiants; ils ont fait de nombreuses
victimes et causé de vastes dégâts matériels.
Du fait de leur caractère destructeur, ils ont une profonde
incidence sur les aspects humains, sociaux et économiques
de nos sociétés. L'histoire nous révéle
que, dans l'ensemble du monde, ils ont anéanti des communautés
entières vivant le long des côtes et que, dans le
passé, leur incidence socio-économique a été
considérable. Dans le Pacifique, où ces vagues
sont le plus fréquentes, des documents anciens font état
d'effroyables catastrophes causant d'énormes pertes en
vies humaines et d'immenses dégâts matériels.
Au Japon, dont les régions côtières sont
parmi les plus peuplées du monde et où l'activité
sismique est trés ancienne, des populations côtières
ont été entièrement anéanties par
des tsanami, On sait aussi que les tsunami ont causé des
ravages en Alaska, dans les iles Hawaii et en Amérique
du Sud, bién que les documents dont nous disposions pour
ces régions soient assez limités. Le dernier grand
tsunami qui a sévi dans l'ensemble du Pacifique s'est
produit en 1960, D'autres ont été enregistrés
depuis lors mais leurs effets étaient localisés.
Nous avons assisté,
ces vingt dernières annees, à une expansion et
un développement considérables des régions
côtières dans la plupart des pays développés
ou en développement du Pacifique. Ce phénomène
s'explique par la croissance démographique et l'évolution
technique et économique qui ont rendu l'exploitation des
zones côtières plus nécessaire qu'auparavant.
Par bonheur, les tsunami ne se produisent que rarement; aussi
leurs effets ne se sont-ils récemment faits sentir dans
aucune région en développement du Pacifique. Néanmoins,
I'histoire nous enseigne que, malgré leur rareté,
les tsunami n'en demeurent pas moins une réalité.
Un grand tsunami risque
de se produire prochainement dans l'ensemble de la région
du Pacifique. Un certain nombre de pays de cette région
ne sont pas préparés à une telle éventualité.
D'autres ont relâché leur vigilance. Or les effets
sociaux et économiques des tsunami à venir ne sauraient
étre sous-estimés. Dans la présente étude,
nous nous proposons donc d'examiner brièvement les conséquences
sociales et économiques des tsanami passés, récents
et à venir, ainsi que la question de la gestion des risques
présentés par les tsananu et la nécessité
d'une planification adéquate pour l'avenir, tout au moins
pour l'océan Pacifique, où la fréquence
des tsunami est élevée.
Les premières
archives relatives aux tsunami
L'incidence des tsanami sur les sociétés
humaines s'est manifestée trés tôt dans l'histoire.
Le premier tsunami dont l'humanité ait conservé
la trace remonte à l'année 1480 av. J.-C., date
à laquelle la civilisation minoenne, établie en
Méditerranée orientale, fut balayée par
des vagues de ce type. Les premiers documents japonais faisant
état de telles catastrophes remontent à l'an 684
de notre ère (1). En ce qui concerne le continent américain,
des tsunami ont été enregistrés en 1788
en Alaska et en 1562 au Chili. Le premier tsanami enregistré
aux Iles Hawaii remonte à 182I.
Certes, les tsunami
les plus dévastateurs sont, pour la plupart, survenus
dans le Pacifique, mais des tsunami destructeurs ont également
été enregistrés dans l'océan Indien
et dans l'océan Atlantique, ainsi qu'en Méditerranée.
Les séismes qui se sont produits à Lisbonne en
1755, dans la passe de Mona, au large de Porto Rico, en 19I8
et à Grand Banks, au Canada, en 1929 se sont accompagnés
de violents tsunami. (photo
de Knsossos)
Les populations du
Pacifique vivent en majorité en bordure ou à proximité
des côtes, car l'intérieur des terres est souvent
montagneux et les terres cultivables se présentent principalement
sous la forme de plaines côtières. De nombreux pays
de la région ont des populations traditionnellement tourné
es vers la mer . Pour la plupart d' entre eux, les échanges
commerciaux sont une nécessité vitale et certains
se sont dotés de flottes de commerce et d' installations
portuaires importantes. L' économie de maints pays insulaires
du Pacifique, comme de ceux qui ont des côtes étendues,
repose également sur l'activité des caboteurs,
et de nombreux petits ports facilitent les échanges entre
les Iles et tout le long des côtes. Des pays comme le Japon,
par exemple, se sont équipés de nombreux ports
et d'importantes installations industrielles telles que chantiers
navals, centrales électriques et raffineries. De méme,
maints pays développés ou en développement
du Pacifique ont de nombreux ports qui servent de bases à
de grandes industries de pêche. C'est le cas notamment
du Pérou, qui entretient dans le port de Callao, près
de Lima, une importante flotte de pêche à l'anchois.
Callao est situé à proximité d'une région
très sismique, potentiellement exposée aux tsunami.
D'autres régions côtières du Pacifique se
sont récemment tournées vers l'aquaculture et l'industrie
de la conserve. Il existe donc un ensemble de facteurs qui, réunis,
rendent nombre d' Iles du Pacifique et de pays continent aux
de la région, développés ou en développement,
socialement et économiquement vulnérables à
la menace des tsunami. L'étendue des côtes, le nombre
des Iles, les longues côtes des pays du Pacifique dotées
de structures vulnérables, le nombre des grands ports,
la presence d'industries rentables de la pêche et de l'aquaculture,
ainsi que la forte densité de population des régions
côtières placent de nombreux pays de la région
dans une position vulnérable.
La vulnerabilité
du Japon
Au Japon, par exemple,
où se trouvent réunis tous les facteurs de vuluérabilité
mentionnés, un tsunami peut avoir des effets sociaux et
économiques réellement dévastateurs. La
côte de Sanriku ou le district de Tohoku, au nord de Honshu,
présentent un certain nombre de plaines côtières
creusées par de nombreuses baies, où d'importantes
industries de pêche et d'aquaculture se sont établies.
Tout au long de l'histoire, des communautés entières
ont eté frappées et anéanties par des tsunami
dans cette région, ce qui a souvent nécessité
leur reconstruction et leur déplacement. Entre 684 et
1960, 65 tsunami au total ont frappé le Japon. A une date
aussi lointaine que le 18 juillet 869, la côte de Sanriku
a été balayée par un tsunami qui a fait
environ un millier de victimes et détruit des centaines
de villages. Le 3 août 1361, un tsunami a détruit
1700 habitations dans cette même région. Le 20 septembre
1498, un tsunami a balayé la péninsule de Kii,
faisant 500 victimes et détruisant un millier d'habitations.
Le 31 janvier 1596, d'énormes pertes en vies humaines
ont été causées par un tsunami qui s'est
abattu sur l'ile de Shikoku, et qui a atteint également
plusieurs régions de Honshu. Kyushu a été
frappé par un violent tsanami en septembre 1596. Plus
près de nous, le violent tsunami de Meiji Sanriku, qui
s'est produit le 15 juin 1896, a fait 27 122 morts, des milliers
de blessés et plusieurs autres milliers de sans-abri.
Le 3 mars 1933, dans la région de Sanriku, un tsunami
dont la hauteur atteignait une trentaine de mètres a tué
plus de 3 000 personnes, fait des centaines de blessés
et détruit approximativement 9 000 habitations et 8 000
bateaux. En décembre 1944, dans le centre de Honshu, un
tsunami a fait près d'un millier de victimes et détruit
plus de 3 000 maisons. Le 21 décembre 1946, le tsunami
de Nankaido a tué 1 500 personnes et detruit 1 151 maisons
(2).
Les tsunami s'abattent
sur le Pacifique
Des tsunami se sont
périodiquement abattus sur les îles Hawaii, causant
des pertes en vies humaines très élevées
et des dégâts matériels considérables.
Le plus violent est celui qui, le 1er avril 1946, a submergé
et détruit la ville de Hilo et tué 159 personnes.
Depuis lors, d'autres tsunami ont été enregistrés
dans les îles Hawaii en 1952, en 1957, en 1960, en 1964
et en 1975 (3).
Le tsunami le plus
dévastateur qui ait frappé l' ensemble de la région
du Pacifique est celui de mai 1960; il a fait de nombreuses victimes
(plus d'un millier au Chili, aux îles Hawaii, aux Philippines
et au Japon, notamment à Okinawa), et a causé d'énormes
dégâts matériels (Pararas-Carayannis, 1975).
(photo: tsunami de
1964, Seward, Alaska).
Plus récemment,
le 16 août 1976, un violent séisme s'est produit
dans le golfe de Moro, aux Philippines; il a engendré
un tsunami local extrémement destructeur, qui a tué
plus de 8 000 personnes et fait 1O 000 blessés et 90 000
sans-abri. (4) Le 12 décembre 1979, un séisme dont
l'épicentre était localisé dans l'État
de Narino, dans le sud-ouest de la Colombie, a provoqué
un tsunami qui a entièrement détruit plusieurs
villages de pêcheurs, tuant des centaines de personnes
et bouleversant l'économie déjà chancelante
de cette région (5).
Il n'y a pas qu'au
Japon ou dans l'océan Pacifique que les tsunami font des
ravages. Des tsunami destructeurs se sont également produits
dans l'océan Indien et l'océan Atlantique, ainsi
que dans la mer des Carabes et en Méditerranée.
Comme nous l'avons déjà indiqué, la violente
éruption et l'explosion du volcan de Santorin, au XVe
siècle av. J.-C., ont engendré un gigantesque tsunami
qui a anéanti la plupart des colonies côtières
minoennes établies sur les îles de la mer Égée,
accélérant ainsi le déclin de cette brillante
civilisation (6). De nombreux autres tsumami ont été
enregistrés en Méditerranée orientale depuis
cette date.
Dans la région
de l'océan Indien, la violente explosion de l'île
volcanique de Krakatoa, en août 1883, a engendré
un tsunami d'une trentaine de mètres de haut qui a fait
36 500 victimes à Java et à Sumatra. n y a cinq
ans, le 19 août 1977, un violent séisme s'est produit
dans les îles de la Sonde orientale, en Indonésie;
il a engendré un tsanami qui a fait des centaines de victimes
sur les îles Lombok et Soumbawa, sur la côte orientale
de l'océan Indien (7).
La région de
l' Atlantique
Des témoignages
historiques font également etat de pertes en vies humaines
et de dégâts matériels considérables
dans la région occidentale de l'Atlantique Nord et Sud,
dans le nord-ouést de l'Europe (8), et dans les régions
d'activité séismique situées à l'est
des Caraibes. Le tsunami atlantique le plus violent est celui
qui a accompagné le séisme de Lisbonne, le 1er
novembre 1755, et qui a touché non seulement le Portugal,
mais aussi l'Espagne, Madére, les Açores, la France,
la Grande-Bretagne et les Antilles. Des tsunami ont été
fréquemment enregistrés au sud de l'Irlande, au
pays de Galles, en Angleterre, ainsi qu' au nord de la péninsule
Ibérique. L ' un des tsunami les plus destructeurs enregistrés
dans la mer des Caraïbes est celui qui s'est abattu sur
Port-Royal, en Jamaque, le 7 juin 1962, et qui, avec le séisme,
a causé la mort de 3 000 personnes. Mentionnons également
les tsunami qui se sont produits le 3 juin 1770 et le 7 mai 1842
à Haïti, le 28 décembre 1867 dans les iles
Vierges, le 14 janvier 1907 en Jamaque et le 11 octobre 1918
à Porto Rico.
L'énumération
qui précède n'est qu'un bref aperçu de quelques-uns
des principaux tsunami enregistrés dans le passé.
Il est très difficile de déterminer avec précision
les répercussions de chacun de ces tsunami sur la région
touchée. Il est évident, néanmoins, que
des catastrophes naturelles telles que les tsunami ont , à
long terme, des conséquences social es et économiques
beaucoup plus importantes quene peuvent le suggérer les
témoignages historiques ou les statistiques. En outre,
les temoignages historiques ne permettent pas de se rendre compte
de l'ampleur des ravages que des tsunami pourraient provoquer
aujourd'hui, étant donné le développement
considérable qui s'est produit depuis vingt ans dans les
régions côtières de nombreux pays développés
et en développement. Les tsunami à venir auront
des répercussions sociales et économiques beaucoup
plus graves que dans le passé. C'est pourquoi il est essentiel
de prévoir de telles éventualités et de
s'y préparer.
Gestion des risques
présentés par les tsunami
Il n'est guére
possible d'empécher une catastrophe naturelle de se produire.
Il est impossible d'éviter les inondations, les sécheresses,
les séismes, les ouragans, les éruptions volcaniques
et les tsunami, Mais l'humanité, qui est douée
de capacités d'adaptation remarquables, a appris à
vivre avec ces risques. Jusqu'ici, nous avons eu une attitude
passive, nous résignant par avance à ces catastrophes
que nous attribuions à la colère divine ou aux
caprices de la nature et que nous ne pouvions prévenir.
Sans doute n'est-il pas possible d'empêcher ces catastrophes
naturelles de se produire, mais il est en notre pouvoir, grâce
à une planification appropriée, d'en limiter les
conséquences et les effets destructeurs sur l'homme et
ses biens. Toutefois, pour parvenir effectivement à atténuer
les effets des tsunami, il faut non seulement bien connaître
la réalité scientifique du phénomène
et de ses manifestations dans tel ou tel lieu géographique,
mais connaître en outre l'ensemble des facteurs physiques,
sociaux ou culturels qui interviennent dans chacune des localités
de chaque pays. Il est évident que certaines régions
sont plus exposées que d'autres aux tsunami. Étant
donné la fréquence élevée des tsunami
dans l'océan Pacifique, les efforts déployés
pour améliorer la gestion des risques se sont concentrés
principalement dans cette région du monde. Cependant lorsqu'
on organise l'amènagement et l' exploitation des zones
côtières, il convient de prendre en considération
l'incidence, même lointaine, des tsunami. Un certain niveau
de risque est acceptable, mais les pouvoirs publics devraient
canaliser le développement et la croissance démographique
vers des régions plus sûres et moins exposées
aux risques potentiels de tsunami . Il conviendrait que les pouvoirs
publics réglementent l' exploitation des terres en fonction
des risques potentiels de tsunami dans telle ou telle région
côtière, en particulier si cette région a
déjà été ravagée dans le passé.
Mesures internationales de protection et de prévention
Les mesures de protection
actuelles reposent es entiellement sur la mise en uvr e de systèmes
d' alerte aux tsunami utilisant un matériel perfectionné
pour la collecte des données et leur communication. Des
pays tels que le Japon, I'Union soviétique, le Canada
et les États-Unis d'Amérique ont mis au point des
systèmes d'alerte aux tsunami relativement élaborés,
et ils se chargent de transmettre les informations recueillies
aux autres pays du Pacifique.
En 1965, la Commission
océanographique intergouvernementale de l'Organisation
des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture
(Unesco/COI) a accepté l'offre que les États-Unis
avaient faite de développer leur centre d'alerte aux tsunami
établi à Honolulu pour le transformer en Centre
d'alerte aux tsunami pour le Pacifique ( PTWC) et elle a créé
un Groupe international de coopération (GIC/ITSU) ainsi
qu'un Centre international d'information sur les tsunami (CIIT)
chargé de surveiller les activités du Système
international d'alerte aux tsunami dans le Pacifique (ITWS).
Le Système d'alerte aux tsunami dans le Pacifique est
aujourd'hui le cur d'un système véritablement international.
Vingt-deux (28 maintenant, a 1997) pays sont actuellement membres
du GIC/ITSU: le Canada, le Chili, la Chine, la Colombie, les
îles Cook, I'Équateur, les États-Unis d'Amérique,
les îles Fidji, la France, le Guatemala, I'Indonésie,
le Japon, le Mexique, la Nouvelle Zélande, le Pérou,
les Philippines, la République de Corée, le Royaume-Uni
(Hong-kong), le Samoa, Singapour, la Thaïlande et l'Union
soviétique. Plusieurs pays et territoires qui n'y ont
pas adhéré maintiennent des stations pour l'ITWS
et des stations marégraphiques sont également installées
dans plusieurs îles du Pacifique. Le réseau actuel
comprend 24 stations sismographiques, 53 stations marégraphiques
et 52 stations d'émission disséminées dans
toute la région du Pacifique et placées, à
des degrés divers, sous l'autorité des États
membres. Le Centre d'alerte aux tsunami pour le Pacifique d'
Honolulu, placé sous l' autorite du National Weather Service
des États-Unis, est le centre opérationnel du réseau.
Le Système international d'alerte aux tsunami dans le
Pacifique (ITWS) a pour fonctions de détecter et de localiser
les séismes dans la région du Pacifique, de déterminer
s'ils ont engendré des tsunami et de transmettre en temps
utile aux populations du Pacifique les informations et les avis
d' alerte destinés à en limiter les effets sur
les plans humain et matériel.
Fonctionnement du systeme
d'alarme
Le système
se met en marche dès qu'une station sismographique du
réseau détecte un séisme d'une ampleur suffisante
pour déclencher le système d'alerte relié
au sismographe de cette station. Les séismes de magnitude
6,5 ou plus sur l'échelle de Richter sont surveillés.
Le PTWC recueille les données; lorsque celles-ci sont
suffisantes, il est possible de localiser le séisme et
d'en calculer la magnitude. Quand les rapports provenant des
stations marégraphiques indiquent qu'un tsunami menace
la population dans une partie du Pacifique ou dans son ensemble,
un avis d'alerte est transmis aux stations d'émission,
qui sont chargées de le diffuser dans le public. Les autorités
mettent alors en uvre des plans préétablis d'évacuation
des zones menacées Si les rapports des stations marégraphiques
montrent qu'aucun tsunami dangereux n'a été engendre,
le PTWC émet un avis d'annulation. Outre le Système
international d'alerte aux tsunami, un certain nombre de systèmes
régionaux d'alerte ont été mis en place
pour prévenir la population des régions où
la fréquence des tsunami est élevée et une
réaction immédiate indispensable. C'est le cas
notamment en Union soviétique, au Japon, en Alaska et
à Hawaii. Toutefois, il subsiste de vastes régions
où il n'est pas possible de détecter ou de surveiller
suffisamment tôt les tsunami et d'alerter la population
pour prévenir des pertes élevées en vies
humaines.
Étant donné
la rareté des grands tsunami dévastateurs, il est
difficile d'établir des plans efficaces de prévision
permettant d'alerter la population. Néanmoins, il est
possible de sensibiliser celle-ci aux risques potentiels présentés
par les tsunami. Des avis d'alerte sont diffusés dans
le public pour convraincre la population d'évacuer les
zones menacces. Il est nécessaire de prévoir des
délais suffisants pour l 'évacuation, qui est une
opération difficile. Souvent, la population ne comprend
pas la signification des avis d'alerte diffusés et ne
sait pas où se situent les zones menacées. La plupart
des gens hésitent à abandonner leur maison ou leur
lieu de travail et, en règle générale, ils
ne réagissent pas très bien aux avis d'alerte,
surtout si de nombreuses fausses alertes se sont déjà
produites.
Perception du danger
par la population
La perception que
la population d'une région côtière a des
risques de tsunami repose sur l'information et sur la confiance
du public dans les organismes gouvernementaux chargés
de les prévoir. Une fréquence abusive des alertes,
due à une connaissance insuffisante du phénomène
ou à l'absence de données fiables sur lesquelles
fonder les prévisions, donne souvent lieu à de
fausses alertes et incite à ne pas tenir compte des avis
d'alerte et des consignes d'évacuation Ces fausses alertes
font perdre confiance dans les capacités du système
et hésiter à prendre les dispositions qui s'imposent
dans l'éventualité d'un tsunami. Même lorsqu'une
prévision de tsanami s'appuie sur des données et
des informations fiables, les dispositifs d'alerte et d'évacuation
peuvent se montrer insuffisants pour atténuer les effets
du tsunami sur la population. La perception que la population
a du danger dépend de son aptitude à comprendre
la réalité scientifique du phénomène,
tout au moins de facon élémentaire, et ses réactions
sont fonction de cette attitude et de la confiance qu'elle a
dans les autorités. Heureusement, les prévisions
de tsumani ont été trés satisfaisantes ces
dernières années et l'image du système d'alerte
ainsi que sa crédibilité se sont considérablement
améliorées. Toutefois, étant donné
la très grande complexité du phénomène,
la prévision n'est pas une science exacte et les donnees
sur lesquelles elle s'appuie se révèlent fréquemment
inadéquates dans certaines régions.
Education de la population
Il est possible d'accroître
le degré de sensibilisation de la population à
la menace potentielle des tsunami grâce à un programme
d'éducation du public. Les autorités responsables
de la défense civile de chaque pays peuvent mettre en
place ce type de programme d'éducation sur les tsunami
en organisant des stages d'études et des réunions
de travail à l'intention des responsables gouvernementaux,
en publiant des brochures d'information sur le dangers des tsunami
et en coordonnant leur action avec celle des médias pour
assurer la diffusion des informations sur les tsunami. D'autres
organismes publics peuvent également prendre des mesures
visant à limiter les dommages que pourraient causer d'éventuels
tsunami, par exemple en définissant une politique judicieuse
d'aménagement des régions côtières
qui prévoirait notamment la délimitation des zones
potentiellement exposées et leur amènagement. Les
institutions scientifiques peuvent entreprendre des recherches
et des études techniques visant à déterminer
les zones d'évacuation ou à définir des
principes de génie paraséismique pour la construction
des bâtiments dans les régions côtières.
On peut envisager d'élaborer des documents audio-visuels
destinés à informer les enfants en milieu scolaire
et le public en général, et de publier des brochures
et des dépliants décrivant le système d'alerte
aux tsunami et indiquant aux populations la conduite à
suivre en cas d'alerte. A l'échelon national, les autorités
peuvent perfectionner et harmoniser leurs dispositifs d'opération
et de communication afin de remplir efficacement leur rôle
lorsque la menace d'un tsanami survient. Il convient de revoir
fréquemment les procèdures d'alerte afin de mieux
définir et de mieux répartir, à tous les
niveaux, les responsabilités respectives des différentes
instances gouvernementales.
Conclusions et recommandations
Malgré les
progrès techniques des vingt dernières annees,
nous sommes encore incapables de prévenir à temps
de nombreuses régions du Pacifique et d'alerter d'autres
régions du monde. Il est indispensable d'améliorer
les communications afin d'assurer une diffusion rapide d'informations
fiables. Une automatisation accrue du traitement et de l'analyse
des donnes est nécessaire. Il convient de poursuivre la
recherche, notamment pour mettre au point des instruments tels
que les détecteurs d'eaux profondes, qui permettraient
de déceler très tôt les tsunami. Des recherches
sont également nécessaires pour l 'interprétation
en temps réel des paramétres d' origine séismique
qui pourront contribuer à l'évaluation des tsunami.
Il paraît indispensable d'intensifier les recherches qui
nous permettront de mieux comprendre l'interaction d'un tsunami
et de la côte.
La recherche peut
aussi nous aider à améliorer les systémes
actuels d'alerte, à mieux amènager les régions
côtières exposees aux tsanami et à définir
les principes de génie paraséismique qui devraient
régir les constructions dans ces régions.
En conclusion, l'objectif
à long terme de tous les pays exposés au risque
de tsunami devrait être d'édifier des infrastructures
scientifiques et techniques adéquates pour parer à
l'éventualité d'une telle catastrophe. Dans l'immédiat,
chacun des pays en question devrait s'attacher à évaluer
ce risque en fonction de ses besoins potentiels et des ressources
dont il dispose. Une bonne préparation implique notamment
la possibilité d'identifier dans les plus brefs délais
des tsunami imminents, des systèmes d'alerte nationaux
et régionaux efficaces qui permettent de prévenir
les populations et les industries côtières, ainsi
que des agents de la défense civile et une population
bien préparés à faire face à une
alerte.
Enfin, il conviendrait
d'améliorer les capacités d'alerte du système
en perfectionnant les instruments destinés à la
surveillance des tsunami et à la diffusion des informations
afin d'accroître l ' efficacité des systémes
d'alerte et la sensibilisation du public, qui est un élément
important de la protection à long terme.
Notes
1. K. Iida, D. Cox
et G. Pararas-Carayannis, Preliminary
catalogue of tsunamis occurring in the Pacific Ocean, Honolulu, Hawali Institute
of Geophysics, University of Hawaii, I967 (Data report 5).
2. Ibid.
3. G. Pararas-Carayannis,
Catalogue of tsunamis
in Hamaii, Boulder,
Colo. (Etats-Unis d'Amérique), World Data Center-A for
solid earth geophysics, I977.
4. CIIT. Rapports sur les tsunami, n° I976-26, 1978.
5. G. Pararas-Carayannis,
"Earthquake
and tsunami of 12 December I979 in Colombia ", Tsunami newsletter, vol 13,
n° 1, 1980, p. 1-9.
6. G. Pararas-Carayannis,
"The international
tsunami werning system ",
Sea frontiers, vol. 23, n° 1, 1977, p. 2O-27.
7. CIIT, Rapports sur les tsunami, n° I977-12, 1978.
8. W. Berningbausen,
"Tsunamis and
seismic seiches reported from the Eastern Atlantic South of the
Bay of Biscay"
, Bulletin of the Seismological Society of America, vol. 54,
n° 1, 1964, p. 439-442.
9. Anonyme, Tsunamis and seismic seiches
reported from the western North and South Atlantic and the coastal
waters of Northwestern Europe,
Washington, D.C., Naval Oceanographic Office, 1968.